Lorsqu’un enfant se comporte mal de façon régulière, il est bon de chercher à savoir ce qui est à l’origine du problème. Y a-t-il quelque chose qui se passe à l’école ou avec une personne qui s’occupe de l’enfant ? La communication avec l’enfant est-elle ouverte ? Existe-t-il des attentes comportementales adaptées au développement de l’enfant ? Aujourd’hui, je suis ravie d’accueillir l’experte en parentalité, psychologue agréée et auteure, le Dr Vanessa Lapointe, pour partager avec nous un aperçu du développement cognitif des enfants et de la façon dont cela affecte leur comportement.
Savoir quelles sont les attentes comportementales appropriées au développement
Le Dr Lapointe est un nom reconnu et de confiance dans le domaine du développement de la petite enfance. À travers la double lorgnette des techniques d’attachement parental et des recherches les plus récentes sur le développement de l’enfant, le Dr Lapointe accompagne les parents sur les champs de bataille où les problèmes sont les plus susceptibles de survenir pour les enfants ; sommeil, alimentation, apprentissage de la propreté, agressivité, rivalité entre frères et sœurs. Elle propose des solutions appropriées conçues pour favoriser le lien et la croissance entre le parent et l’enfant.
L’extrait suivant est tiré de PARENTER DÈS LE DÉPART (8 octobre 2019), reproduit avec autorisation
Sensibilisation au développement
Combien de fois vous êtes-vous assis dans un restaurant et avez-vous vu un enfant de moins de six ans se faire gronder parce qu’il ne restait pas assis pendant le repas ? Ou entendu un enfant de trois ou quatre ans se faire réprimander pour ne pas avoir partagé ? Ou observé un enfant de huit ans puni pour avoir fait une crise lorsqu’on lui a demandé de sortir les poubelles ? Ou vu un enfant de quatorze ans se faire punir pour avoir paniqué lorsqu’on lui a dit qu’il ne pourrait pas sortir avec ses amis un vendredi soir ?
La réponse parentale de punition et de conséquence pour de tels actes n’est pas un phénomène rare dans notre monde. Pourtant, chacun de ces exemples représente un enfant au cerveau sous-développé qui réagit exactement comme il le devrait en fonction de son stade de développement. Beaucoup d’entre nous tombent dans le piège qui consiste à attendre d’un enfant qu’il absorbe et adopte le comportement d’un adulte, même si le cerveau humain n’atteint pas sa pleine maturité avant un certain temps entre le milieu et la fin de la vingtaine.
Cet enfant de six ans qui gigote à la table du dîner est incapable d’une concentration et d’une attention soutenues ; l’enfant de trois ans ne sait tout simplement pas partager ; l’enfant de huit ans n’a pas développé la maîtrise de soi nécessaire pour rester calme face à un barrage routier comme les “corvées” alors que ce qu’il veut vraiment faire, c’est tirer des paniers ; et l’enfant de quatorze ans va forcément perdre le contrôle de ses sentiments face aux grandes émotions. Alors calmez-vous, les grands. Vos enfants sont en train d’être et de faire exactement ce qu’ils sont censés être et faire tout au long de leur parcours de développement tout à fait normal.
Le problème est qu’attendre que le développement se produise peut être gênant pour nous, les grandes personnes qui élèvent des enfants dans un monde au rythme effréné. Nous essayons de presser le développement au lieu de le défendre à chaque étape du parcours. Mais les enfants ne sont pas de petits adultes, et nous ne pouvons pas les forcer à devenir des adultes. L’autorégulation sera différente chez un bébé, un jeune enfant et un enfant d’âge préscolaire. Les bébés mordent parce qu’ils ne connaissent aucun autre moyen de calmer leur corps. Les tout-petits font des crises de colère parce qu’ils essaient de comprendre comment devenir leur propre personne, même s’ils n’ont pas la capacité de se calmer face à des émotions intenses. Les enfants d’âge préscolaire bousculent, poussent, frappent et n’attendent pas leur tour parce que ces gentillesses comportementales sont encore un langage avant-coureur lorsqu’elles sont prises en charge par un grand désir ou un besoin. Nous devons respecter le fait que le cerveau des enfants se développe au rythme de milliards de connexions neuronales par jour.
Les enfants ont besoin d’être informés de leurs besoins
Une fois, après que j’ai présenté un atelier, un père m’a raconté comment son fils de neuf ans avait eu du mal à gérer ses grandes émotions en réponse à des nouvelles décevantes ou à des demandes de ses parents pour accomplir des tâches ménagères. Chaque fois que l’enfant perdait les pédales, ses parents le réprimandaient pour son “mauvais comportement” et utilisaient des stratégies inspirées du comportementalisme telles que les conséquences, les temps morts et la suppression des privilèges. Un jour, après un autre de ces incidents, le père a demandé à son fils, exaspéré, “Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? Pourquoi ne peux-tu pas faire ce qu’on te dit et arrêter de réagir comme ça ? Je te l’ai dit un million de fois !” Dans sa superbe et infinie sagesse, le fils répondit à son père : “Papa, qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? Tu me l’as dit un million de fois et je n’y arrive toujours pas. Pourquoi tu me répètes toujours la même chose alors que je n’y arrive pas ?”. C’est ça.
Vous ne pouvez pas accélérer la croissance et la maturité en exigeant sa progression. Comme le dit David Loyst, un spécialiste du développement de l’enfant qui travaille avec des enfants autistes, “je n’ai jamais vu une plante pousser plus vite en tirant sur son sommet.” Au lieu d’exiger le développement, le travail d’un parent est de l’inspirer et de le défendre. Rappelons maintenant que la connexion et l’attachement sont les fondements d’un développement sain de l’enfant.
Ce regard sur les attentes comportementales appropriées au développement a-t-il changé votre perspective ou vous a-t-il rappelé des histoires drôles ou des questions ?